La sorcellerie : est-elle physique ou spirituelle ?

sorcellerie physique ou spirituelle

Dans notre tentative de découvrir ce qu’est la sorcellerie, un point important est de savoir si elle est spirituelle ou physique. En effet, c’est une question que les gens se posent assez souvent. De ce fait, il est primordial de tenter d’éclaircir ce point. 

Dans un article précédent, « Qu’est-ce que la sorcellerie ? », on a présenté la sorcellerie comme étant similaire à la possession d’esprit. Cependant, on considère les deux phénomènes (sorcellerie et possessions) comme des objets bien distincts. Aussi, la sorcellerie est souvent directement liée aux rêves, mais est prétendument différente de ces derniers. 

Sur la base de ces constatations, on pourrait poser plusieurs questions : qu’est-ce donc la sorcellerie ? Est-ce un phénomène spirituel ? Serait-ce au contraire un phénomène physique ? ou bien allierait-elle les deux points en un seul, à savoir physique et spirituel ? 

Le bayikukuo : l’objet spirituel de la sorcellerie

Chez les Akans, on définit abayigoro (la sorcellerie) comme un concept structuré aux diverses facettes, bien que considéré comme un acte mystérieux. La sorcière est censée posséder un bayikukuo (un objet de sorcellerie) que l’on pense être un pot contenant un mélange de sang humain et d’articles tels que des perles, des herbes, des ongles humains et des serpents. On suggère que cet objet de sorcellerie se cache dans divers endroits tels que sa chambre, une ferme, une rivière, le fumier à l’intérieur du foyer ou juste à l’extérieur de sa maison. On s’attend à ce qu’une personne accusée de sorcellerie montre où l’objet de sorcellerie se cache, afin qu’on le détruise.

Cependant, on dit que de tels objets sont spirituels et ne peuvent être produits physiquement. Cette croyance cause beaucoup de confusion, car très peu de soi-disant sorcières sont capables de produire un objet de sorcellerie.

Dans un cas historique rapporté où l’objet de sorcellerie a été demandé à une présumée sorcière, aucun élément physique n’a pu être trouvé. Lorsqu’elle fut contrainte, elle a coupé le doigt d’un garçon et l’a présenté aux accusateurs. L’affaire a abouti finalement à la police, et cela a été rapporté dans les quotidiens du Ghana. Ainsi, alors que certains croient que l’objet de la sorcellerie est matériel, d’autres pensent qu’il est immatériel (ou spirituel).

L’animus : animal spirituel de la sorcière

Un autre accessoire de la sorcière est censé être ahoboa (le moi animal). On peut le traduire par « le pouvoir animal qui est en moi » ou bien « l’animal esprit-sorcière ». Ceci dit, on préférera le terme « animal-sorcier » pour cet article. L’animal-sorcier est censé être un animal tel qu’un serpent, un chien, un lion, un oiseau ou même un mille-pattes.

Cet animus est censé être un animal spirituel invisible, mais peut se matérialiser au moment de l’accomplissement d’un sortilège. On considère qu’une personne peut avoir plus d’un animal esprit-sorcier. D’ailleurs, plus une personne a d’animaux spirituels, plus elle devient puissante. Certaines sorcières portent leur esprit de sorcière sur elles, dans des articles tels que des bijoux, des ceintures et des perles à cordes portées autour de la taille, des poignets, des chevilles ou des genoux. Alors que d’autres semblent les porter dans leur estomac ou quelque part dans le ventre.

Ainsi, ces animaux spirituels accomplissent des actions pour les sorcières. On dit que si un tel animal est tué dans l’accomplissement de son rituel, la sorcière mourra également. D’autres, cependant, affirment que l’animal esprit-sorcier ne peut jamais être attrapé, capturé ou tué, puisqu’il s’agit d’un animal spirituel. Ainsi, on considère ce dernier comme le véritable pouvoir de la sorcière. Sans l’animal esprit-sorcier, il n’y a pas de sorcellerie.

En effet, quand on accuse quelqu’un de sorcellerie, on lui demande de montrer l’animal esprit-sorcier qu’il porte en lui. À cet égard, dans un cas rapporté à la radio, un pasteur autoproclamé a contraint une jeune fille, et ceci en auscultant ses parties génitales. Il dit avoir fait cela pour tenter de faire ressortir l’animal sorcier que l’on pensait être une tortue. Ainsi, ce système de croyances conduit parfois à des abus dans de nombreux cas.

La matérialité ou l’immatérialité de la sorcellerie

Du point de vue Akan, la croyance selon laquelle l’objet de la sorcellerie et l’animal esprit-sorcier sont spirituels place la sorcière au-dessus du niveau d’un être humain ordinaire. Cette idée que les sorcières ne sont pas « normales », mais possèdent des pouvoirs surnaturels qui en font des « êtres humains-esprits » crée de la peur chez les gens.

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La sorcellerie don ou malédiction de Dieu

La question de l’acquisition de sorcellerie rend le concept plus complexe. Il est assez courant de penser que l’on peut acquérir la sorcellerie par divers moyens. L’hérédité est l’un de ces moyens. Il est admis qu’une personne dont la sorcellerie est héréditaire aurait pu la recevoir du Dieu tout-puissant. On considère que ces sorcières sont dotées d’une grande puissance.

À cet égard, un témoignage rapporte qu’une jeune femme prétendait être une chrétienne née avec la sorcellerie en elle. Elle a affirmé que de nombreux pasteurs avaient prié pour elle plusieurs fois sans résultat.

Elle a aussi raconté qu’elle se voyait souvent dans des endroits où elle n’avait jamais été. Quand elle a visité ces lieux plus tard, elle a réalisé que tout ce qu’elle avait vu était réel. Elle a aussi affirmé utiliser ces connaissances pour prédire les conclusions et résultats des réunions, afin d’aider son manager. Elle faisait cela pour susciter l’admiration et sa promotion.

La sorcellerie comme héritage familial

Une autre hypothèse est que l’on peut donner la sorcellerie à un bébé à naître dans le ventre de sa mère. Dans un tel cas, cette sorcellerie est considérée comme un héritage familial qui doit être transféré d’un membre de la famille à un autre. Un membre de la famille mourant pourrait le transférer à un autre membre de la famille bien-aimé, à l’insu du destinataire. Dans des cas exceptionnels, on pense que l’on peut donner la sorcellerie à un ami, même s’il ne fait pas partie de la famille.

La sorcellerie transférée par une sorcière mourante à un être cher à son insu commence à se manifester chez le destinataire après la mort du cédant. Par coïncidence, les effets de la mort d’êtres chers sur les proches rendent parfois certains d’entre eux émotifs, nerveux, bavards et rêvasseurs. Ainsi, beaucoup de ces personnes qui ont eu un membre de leur famille sorcier, sont prises pour des sorcières.

La croyance que la sorcellerie opère au sein d’une famille laisse à penser que les sorcières de la famille causeraient la chute, le succès ou la mort des membres de leur propre famille. Ainsi, quand quelqu’un prospère, on suppose que les sorcières de la famille sont bonnes. D’un autre côté, quand quelqu’un ne prospère pas, on pense que la méchanceté des sorcières de cette famille a conduit à cette condition d’échec ou dans certains cas à la mort. Cette croyance mène à des accusations de sorcellerie entre les membres de la famille.

La sorcellerie transmise comme cadeau

On dit qu’un autre moyen d’obtenir la sorcellerie consiste à recevoir des cadeaux. Une sorcière pratiquante peut ensorceler des articles tels que des bijoux (colliers en ambre ou des perles) et des vêtements avec son pouvoir. On peut donner ces cadeaux chargés de pouvoir à une personne sans qu’elle ne sache qu’ils contenaient de la sorcellerie. Une fois que l’on reçoit un tel cadeau, la personne peut commencer à faire de la sorcellerie manifeste.

La sorcellerie acquise par voie d’aliments

Une croyance en une autre méthode d’acquisition de la sorcellerie consiste à manger certains aliments préparés par une sorcière et chargés de pouvoir. L’une des formes de cet aliment de sorcellerie est une purée de plantain mélangée à de l’huile rouge. Cette hypothèse d’acquisition de la sorcellerie par ignorance conduit à la spéculation qu’une personne peut être une sorcière sans le savoir. Ainsi, une personne spirituellement puissante peut affirmer à une sorcière ignorante qu’elle a été envahie par la sorcellerie.

La croyance selon laquelle la sorcellerie peut être donnée aux gens contre leur volonté pose problème. Dans une telle situation, on suppose que le destinataire peut tomber malade s’il la rejette. Ces victimes peuvent souffrir d’épilepsie ou de folie, et peuvent même mourir à cause de leur rejet de la sorcellerie. Cette hypothèse conduit à la stigmatisation des personnes atteintes d’épilepsie ou de troubles mentaux parce qu’on les considère comme sorcières.

Pour conclure

En conclusion, on peut considérer la sorcellerie à la fois comme matérielle et immatérielle selon les croyances. Mais il faut surtout la considérer comme une organisation très complexe liée à différents éléments qui la fondent.

Cet article a exploré les différentes façons dont la sorcellerie est censée être acquise, à la fois volontairement et involontairement. Qu’il s’agisse de dons héréditaires de Dieu ou d’un membre de la famille, de manger des aliments maudits ou de recevoir en cadeau des objets chargés de pouvoir, il est clair qu’il existe de multiples théories sur la manière dont on peut devenir sorcier. Toutefois, ce système de croyances peut conduire à de graves abus à l’encontre des personnes accusées de pratiquer la sorcellerie. Il est important que nous comprenions tous ces différentes croyances afin de pouvoir protéger les personnes vulnérables qui peuvent être injustement prises pour cible en raison de superstitions et de peurs infondées. Grâce à l’éducation et à la compréhension, nous pouvons créer des communautés plus sûres où les croyances spirituelles de chacun sont respectées et honorées sans jugement ni préjugé.